Quand je convoque l'enfant que j'étais


Il y a un peu plus d’un an, j’écrivais sur le bonheur que m’apportait le fait de fréquenter de nouveau la bibliothèque et comment cette habitude avait amené une réflexion sur la matérialité. 

Aujourd’hui je fête, ou plutôt commémore, les deux ans de l’accident qui a failli me couter la vie et qui m’a couté la personne que j’étais, l’événement qui a emporté beaucoup de souvenirs matériels. Je suis assez fataliste, on ne peut rien faire contre le destin, je pense que pas mal de choses sont écrites et on a beau dévier, le vent nous ramène là où on doit être à tel moment de notre histoire. 

Cet accident a changé la personne que je suis. Sans avoir été une accumulatrice, j’avoue avec du recul que j’étais porté sur le fait d’avoir, de posséder. Je pense que cela me rassurait et que dans l’inconnu je me raccrochais à ce que j’avais. Perdre, dans tous les sens du terme, c’est synonyme d’échec, on échoue à arriver là où on le voulait. Avec le temps, j’y vois un signe, un rappel à l’ordre, que je ne devais pas poursuivre à cet endroit, mais l’expression « un mal pour un bien » m’est encore difficile à mettre sur cet événement. 


Néanmoins, il a remis plusieurs choses au centre de ma vie, il a remit comme j’aime l’entendre dire « l’église au centre du village ». Ce qu’il y a de plus importants dans mon existence, c’est ma famille, mes proches, comme beaucoup au final. Les avoir prés de moi, les savoir en bonne santé, biens, suffit à la ligne de mon épanouissement quotidien. Le reste, c’est du bonus : le travail, qui n’est pas une corvée et permet pécuniairement de vivre, de ne pas compter (ou le moins possible) est un plus, tout comme le temps; le temps d’aller courir, de lire, de me balader, de faire ce qui m’enchante, ajoute à mon équilibre. Que faut-il d’autre pour être heureux ? Je dirai éloigner les soucis, régler les problèmes avant le naufrage du bateau. Je n’arrive pas, je n’arrive plus à placer le fait d’avoir un nouveau jeans, une nouvelle bague, un nouveau gadget électronique dans cette sphère de bonheur qui règle ma vie. Je ne dis pas que ce n’est pas un plaisir mais ça ne régit plus mon épanouissement. 


J’ai apprivoisé cette nouvelle face de ma personnalité et l’ai étiolé. Finalement, quand je regarde en arrière, quand je convoque l’enfant que j’étais, le sommet du bonheur, j’avais des plaisirs simples qui n’étaient pas liés au matériel; j’aimais jouer et plus généralement passer du temps avec mes parents, manger et cuisiner, regarder la télé, écouter de la musique, lire, jouer et m’inventer mille vies, j’aimais me balader dans l’écrin de nature qui entourait la Maison.En promenade avec mes frères, on passe devant la Maison. Je fais à autre fois la réflexion qu’il m’est difficile de la regarder sans envier ces occupants. Mes seize premières années de vie là-bas, me reviennent en boomerang de plus en plus violent. « je veux l’acheter ». Impossible évidemment, elle n’est pas à vendre. Un de mes frères me fait remarquer que ce sont les souvenirs que j’y ai laissé, plutôt que les murs que je chéris. Il a raison. Derrière mon ordinateur, je sais que c’est vrai. J’aime le passé qu’on y a laissé. 


Plus le temps passe, plus les souvenirs bruts restent, ceux liés à ce que je portais, à ce que j’avais comme jouets disparaissent. L’effet de mémoire garde ce qui compte. La nostalgie des années 2000 me gagne peu à peu. Signe de vieillesse, de boomer en devenir, je regarde le passé avec regret. Écouter Souchon ne m’arrange pas. Pourtant, si j’aime me rappeler qu’on portait cela, qu’on mangeait ci « dans les années 2000 », je garde surtout l’impression que la vie était plus simple. Il n’y avait pas les réseaux sociaux et internet ne c’était pas démocratisé dans ma famille. On laissait le temps passer. On jouer avec. On s’occuper. On prenait bien garde aussi à s’ennuyer. C’est au final un changement de paradigme qui m’a gagné et qui a gagné la société dans son ensemble. Mais la maturité, m’apprend à récupérer mon due; mon éducation et ma personnalité. M’éloigner du superflu, m’a rendu telle que j’étais. Alors oui, je préfère discuter « en vrai » avec les gens, non je n’ai pas Tiktok ni Snapchat, oui je préfère faire une promenade qu’allait faire les magasins, oui je suis plutôt du matin que du soir. Je ne vais pas continuer ici la liste de courses, mais je pense et j’écris qu’il est important d’écouter son coeur, il peut se tromper mais il est d'une grande authenticité. 


Pour bader comme il se doit sur le passé

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